La RDC est confrontée à une augmentation significative des cas de désinformation et des discours de haine, exacerbés par une utilisation croissante des réseaux sociaux. En parallèle, les femmes restent particulièrement vulnérables face au harcèlement en ligne, révèle le rapport final du Centre Carter sur les élections générales de décembre 2023.
Accès accru à l’information en ligne
Depuis les élections de 2018, le taux d’utilisation d’Internet en RDC est passé de 6,2 % en janvier 2019 à 27,2 % en janvier 2024, soit environ 27 millions de personnes connectées. Facebook, avec approximativement 4,7 millions d’utilisateurs, et WhatsApp, largement utilisé pour le partage d’informations, sont les plateformes privilégiées.
Propagation de la désinformation
Le Centre Carter a observé de nombreuses campagnes de désinformation circulant principalement sur WhatsApp. Ces campagnes ciblaient souvent des candidats individuels, des missions internationales d’observation des élections – y compris le Centre Carter – et prétendaient une ingérence étrangère dans le processus électoral.
Impact sur le processus électoral
Entre le 20 novembre 2023 et le 23 janvier 2024, le Centre Carter a analysé 6 006 messages de 83 comptes différents de candidats à la présidence, de partis politiques, d’organisations de la société civile et d’autres acteurs politiques sur Facebook et X (anciennement Twitter). Parmi ces messages, 1 445 étaient liés aux élections. Les messages contenant des photos ou des vidéos mobilisaient plus d’attention que les messages écrits, abordant souvent des sujets comme la campagne électorale, les politiques publiques et les comportements politiques démocratiques.
Discours de haine et tensions ethniques
Les discours haineux des principaux dirigeants politiques sur Facebook et X ont été rares, mais les observateurs ont signalé des propos haineux parmi les utilisateurs, notamment concernant le clivage tribal et régional entre le Katanga et le Kasaï. Ces discussions en ligne ont parfois contribué à accroître les tensions ethniques et à provoquer des affrontements violents.
Environnement hostile pour les femmes
Les plateformes virtuelles se révèlent également être un environnement hostile pour les femmes. Les candidates à la présidence ont souvent été la cible de messages misogynes et discriminatoires sur le rôle des femmes dans la société. De plus, profitant d’un sentiment anti-LGBTQI+ répandu, certains candidats et leurs partisans ont tenté d’associer des opposants politiques à la défense des droits des LGBTQI+, en tenant des propos ambigus à l’encontre de cette communauté.
Le Centre Carter avait lancé une mission internationale d’observation des élections en RDC en septembre 2023, avec la participation de 44 experts et observateurs électoraux internationaux, dont 24 observateurs de long terme dans 12 provinces. Le jour des élections, la mission était dirigée par Catherine Samba-Panza, ancienne présidente de transition de la République centrafricaine. Le rapport final de cette mission a été rendu public mercredi 24 juillet 2024.
Nous avons documenté ces phénomènes dans notre ouvrage « Sociologie du journalisme des problèmes publics à la croisée des discours » paru le 23 mai 2023 aux éditions Mabiki (Wavre). Le livre est toujours disponible dans les bonnes librairies de Kinshasa.